Pilote et instructeur chez Airbus.
Stéphan Labrucherie, 52 ans, est « Head of Flight Training Worlwide », responsable pédagogique monde pour la formation, chez Airbus.
Stéphan a toujours vécu au milieu des avions avec une famille qui compte plusieurs pilotes, dont son père, lui-même instructeur et pilote de ligne. Ses premiers choix le mènent cependant vers le sport de haut niveau, ce qui ne l’empêche pas d’apprendre à voler sous la tutelle de son paternel qui va successivement lui faire passer la licence de pilote privé, l’IFR, la licence pro… « J’ai présenté tous mes examens en candidat libre. À l’époque, dans les années 1990, passer par un organisme agréé n’était pas obligatoire. Mon père m’a ainsi conduit jusqu’au pilote pro IFR bimoteur. Ce n’était pas forcément plus facile qu’aujourd’hui où l’élève-pilote est davantage préparé au caractère mondial du métier. Lorsque je me suis lancé en tant que pilote, on trouvait peu de Français dans les compagnies étrangères, y compris européennes puisqu’il n’y avait pas alors de licence EASA. »
Du Pilatus à l’Airbus…
Stéphan, contraint d’interrompre sa carrière d’athlète, se concentre en effet sur le pilotage. Il continue donc avec l’ATPL qu’il paye en larguant des parachutistes et en donnant des cours sur les facteurs humains. En 1996, il est embauché par une compagnie pour acheminer le personnel d’entreprises pétrolières sur Pilatus, en Algérie. En parallèle, il se finance une QT JAR-25 (qualification de type) pour piloter des avions multipilotes plus lourds. En 1997, il intègre Air Toulouse comme copi B737 et transporte essentiellement des pèlerins depuis Tarbes. En 1999, il arrive chez Corsair comme copilote sur A330. Stéphan apprend qu’Airbus ouvre des places d’instructeurs aux pilotes de ligne : il postule et devient SFI A330 (Synthetic Flight Instructor) en 2002. Son poste de travail varie entre la ligne chez Corsair et le simu chez Airbus. Stéphan entend alors parler d’une compagnie qui est en train de se monter à Abou Dabi : Etihad. Il tente sa chance. Son expérience sur A330 est un atout, il est embauché en 2005 et passera commandant de bord deux ans plus tard. Il forme toujours à côté et devient aussi TRI/TRE A320 (Type Rating Instructor/Examiner).
« Dès qu’une opportunité s’ouvre, il faut voir ce qu’elle peut apporter en plus. Le pilotage n’est qu’un bout du spectre. Quand les compagnies embauchent, elles cherchent de futurs commandants de bord et regardent beaucoup plus les comportements, les « soft skills ». Il faut aussi se former de manière à être un acteur de la mondialisation. Chez Airbus, j’ai ainsi appris à m’exprimer en anglais dans un cockpit, dans un contexte de travail et pas uniquement à la radio. Les recruteurs ont dépassé ma nationalité pour se baser sur mon profil de pilote. » En 2010, Stéphan troque Etihad pour Air China où il restera quelques mois, le temps d’apprendre qu’Airbus cherche des instructeurs expérimentés.
Stéphan passe la sélection et est embauché à Toulouse comme instructeur à la production. En plus du simulateur, il accompagne en ligne les pilotes des compagnies lorsqu’elles réceptionnent leurs avions neufs. L’autre aspect de son métier l’amène à convoyer A320 et A330 vers leurs nouvelles bases. En 2015, Stéphan ajoute l’A350 à son champ de compétences ; il passera aussi sa QT A380, sans pour autant faire de l’instruction dessus. « Chaque compagnie a son propre ADN et opère ses avions différemment. Il m’est demandé de m’adapter et d’apporter des solutions. Plus que pilote et instructeur, mon métier exige également de maîtriser certains aspects techniques et de sécurité. Je suis là pour aider le client et lui montrer la pleine capacité de son avion pour qu’il l’exploite au mieux sur son réseau. »
Un maître d’orchestre de l’instruction
En mars 2015, Stéphan bascule dans le management en devenant « Head of TRI », il est le responsable des missions de vol des instructeurs Airbus. En 2017, il remplace le « Head of flight training Europe » à la tête du centre de Toulouse. En juillet 2021, il s’occupe de l’ensemble du réseau « training » d’Airbus avec davantage une posture de maître d’orchestre qui le conduit notamment, avec ses équipes, à préparer les formations de demain qui doivent à la fois répondre aux exigences réglementaires et aux standards du constructeur. Bien entendu, Stéphan n’a jamais arrêté de voler et il s’apprête du reste à convoyer un A350 au Japon. « Le parcours de pilote amène toujours son lot de doutes et de difficultés, mais le métier rend toujours à celui qui sait s’engager. »